Réalisatrice, scénariste et actrice française, Lola Bessis s’impose comme une voix innovante du cinéma contemporain. Après Swim Little Fish Swim et plusieurs projets internationaux, elle revient avec son nouveau long-métrage Silver Star, alliance réussie de sensibilité et de modernité, que notre rédaction a beaucoup apprécié. Pour My4Fab, l’artiste répond à quatre questions autour de nos thèmes principaux.
Director, screenwriter, and actrice française, Lola Bessis establishes herself as an innovative voice in contemporary cinema. After Swim Little Fish Swim and several international projects, she returns with her new feature film Silver Star, a successful blend of sensitivity and modernity, which our editorial team greatly appreciated. For My4Fab, the artist answers four questions around our main themes.

Si vous deviez faire découvrir votre univers à quelqu’un, quels seraient les 4 films, livres ou œuvres qui vous semblent essentiels ?
Lola Bessis. Tout Milan Kundera – et en particulier L’Ignorance qui est le premier que j’ai lu vers 18 ans. Parce qu’il parle de la mémoire, du déracinement et des liens familiaux d’une façon très juste. J’aime la clarté et l’accessibilité de son écriture autant que la complexité et l’originalité de sa construction narrative très libre : il mêle essai, fiction, introspection, réflexion philosophique, souvent en brisant les codes du roman « classique ». C’est aussi ce qui me plaît dans le cinéma de Jean-Luc Godard qui se libère de tous les codes de la narration traditionnelle. C’est très libérateur.
Du coup en deuxième je dirais Jean-Luc Godard – le premier film que j’ai vu de lui c’était Masculin féminin, que j’avais acheté d’occasion chez Gibert quand j’étais en prépa. Ça a été une claque pour moi qui rêvait de faire du cinéma. Pour sa liberté totale, son propos politique sous ses airs de comédie de badinage amoureux. Et pour Jean-Pierre Léaud !
Anne Berest – La Carte postale. J’adore Anne que j’ai connue quand nous étions toutes deux jurées au festival de Deauville. Elle est brillante et charismatique. J’ai lu tous ses livres et j’aime la manière dont elle aussi relie l’intime à l’Histoire sous forme d’enquête comme un puzzle familial. Et dans La Carte postale on parle de l’Histoire avec un grand H qui est aussi l’histoire de sa famille. Elle rend la période de la Shoah accessible et permet d’en comprendre les enjeux comme si on y était, avec une grande sensibilité.
John Cassavetes – A Woman Under the Influence. Parce que Cassavetes y filme avec une grande liberté la vérité à vif : une femme qui déborde, qui cherche sa place, qui refuse de jouer le rôle que la société lui impose, celui de la mère parfaite, de l’épouse modèle, toujours belle et attentionnée. Et alors que tous essaient de la normaliser, de la corriger, Cassavetes, lui, choisit de la regarder avec une empathie radicale. Il affirme que sa sensibilité n’est pas un défaut à réparer, mais une humanité à accueillir.
If you had to introduce your world to someone, which four films, books, or works would you consider essential?
Everything by Milan Kundera, especially Ignorance, which I first read at 18. His work addresses memory, uprooting, and family ties with great accuracy. I admire the clarity and accessibility of his writing as much as the complexity and originality of his narrative style, blending essay, fiction, introspection, and philosophical reflection, often breaking traditional novel conventions. This freedom in storytelling is similar to what I love about Jean-Luc Godard’s cinema, which breaks all the rules of classic narration—it is very liberating. Secondly, Jean-Luc Godard—Masculin féminin was the first of his films I saw, bought second-hand during my prep school years. It was a revelation for a young filmmaker like me, for its total freedom, political undertone behind a playful love comedy, and of course Jean-Pierre Léaud! I also admire Anne Berest—The Postcard. I met her when we were jurors at the Deauville Festival. She brilliantly connects intimate stories to history in a puzzle-like family investigation. In The Postcard, she addresses the Holocaust with great sensitivity, making this important historical period accessible and deeply understood. Lastly, John Cassavetes’ A Woman Under the Influence resonates with me for its radical empathy: portraying a woman overwhelmed, seeking her place, refusing societal roles of the perfect mother and wife. Instead of trying to “fix” her, Cassavetes embraces her sensitivity as a profound humanity to welcome.

Quelles sont les 4 destinations qui vous ont le plus marquée et pourquoi ?
La Tunisie
Parce que c’est le pays de mes origines, celui où mes parents sont nés et où ils se sont rencontrés. C’est aussi là que j’ai rencontré Ruben, mon compagnon. J’y retourne presque chaque été et je m’y sens chez moi. Chaque voyage me permet de garder le lien avec mon histoire et mes origines. J’ai hâte d’y emmener mon fils.
New York
Parce que j’y ai vécu les années les plus fondatrices pour moi. Je ressens toujours la même émotion quand j’y retourne. C’est une ville qui m’évoque la jeunesse, le cinéma, l’art underground, Basquiat, Bowie, Lou Reed (que je croisais souvent au petit déjeuner). J’y ai découvert des choses qu’on ne trouve nulle part ailleurs, ce mélange de cultures et cette énergie unique qui donne l’impression que tout est possible. J’y ai vécu des moments inoubliables avec Ruben et notamment le tournage de notre premier long-métrage, Swim Little Fish Swim. Dès que j’y mets les pieds, j’y retrouve une forme d’insouciance mêlée de nostalgie.
Melbourne
J’y ai vécu quatre mois pour tourner une série (Picnic at Hanging Rock), j’y ai fait des rencontres inoubliables et approché des kangourous, mon animal préféré ! J’aime sa lumière et son art de vivre. Les gens y sont incroyablement chaleureux, et c’est probablement l’endroit où j’ai le mieux mangé de ma vie. Melbourne est loin de tout, mais c’est aussi ce qui la rend si particulière. On peut y vivre comme dans une grande ville tout en ayant la nature à portée de main.
Le Sri Lanka
Parce que c’est un petit pays encore assez préservé du tourisme de masse, et donc particulièrement authentique. Les gens y sont d’une gentillesse incroyable, et la nature y est spectaculaire : un mélange étonnant de jungle et de mer, avec des paysages à couper le souffle et des animaux partout. La cuisine y est d’un raffinement rare — d’ailleurs « raffinement » est sans doute le mot qui décrit le mieux ce pays, à la fois discret, profond et magique.
What are the four destinations that left the biggest impression on you, and why?
Tunisia is the country of my origins, where my parents were born and met. It is also where I met Ruben, my partner. I return almost every summer and feel at home there. Each trip helps me maintain the connection to my history and roots. I can’t wait to take my son there. New York is where I lived my most formative years. I still feel the same emotion whenever I go back. The city reminds me of youth, cinema, underground art, Basquiat, Bowie, Lou Reed (whom I often saw at breakfast). There, I discovered things nowhere else found—the blend of cultures and unique energy that makes everything seem possible. I experienced unforgettable moments with Ruben, including shooting our first feature film, Swim Little Fish Swim. Every time I set foot there, I find a mix of carefree spirit and nostalgia. In Melbourne, I spent four months filming a series (Picnic at Hanging Rock), made unforgettable encounters, and even got close to kangaroos, my favorite animals! I love its light and lifestyle. The people are incredibly warm, and it is probably where I’ve eaten the best food of my life. Melbourne feels far from everything, but that’s what makes it special—you can live like in a big city while having nature within reach. Sri Lanka is a small country still largely untouched by mass tourism, making it particularly authentic. The people are incredibly kind, and the nature is spectacular—a stunning mix of jungle and sea, breathtaking landscapes, and abundant wildlife. Its cuisine is exceptionally refined—the word “refinement” perfectly describes this discreet, profound, and magical country.

Y a-t-il 4 rituels ou habitudes que vous suivez pour rester en forme et vous sentir bien au quotidien ?
Depuis que Ruben, mon compagnon, s’est vu prescrire 10 000 pas par jour, on essaie de marcher ensemble le matin aux Buttes-Chaumont. Ça m’aide énormément à y voir plus clair avant de commencer ma journée, et à garder un semblant de forme.
Danser et chanter avec mon fils : c’est notre petit rituel quotidien. Rien ne me remet plus vite en énergie qu’un moment où on danse et chante tous les deux, sans réfléchir, juste pour le plaisir.
Cuisiner – surtout ensemble : j’adore cuisiner, c’est vraiment essentiel pour moi. J’aime recevoir et tester de nouvelles recettes sur mes meilleurs cobayes : mon mec et mon fils.
La Cicalfate – tout le temps, partout. J’ai très peu de cosmétiques car quand j’en achète je n’ai jamais le temps de les mettre et parce que je suis un peu sceptique sur les vertus vantées par les marques, mais côté Cicalfate c’est testé et approuvé : dès que j’en mets je me sens plus en forme, ma peau ne tire plus, c’est un besoin au quotidien. J’en mets sur moi, sur mon fils, sur Ruben… j’ai l’impression que cette crème répare absolument tout.
Are there 4 rituals or habits you follow to stay in shape and feel good every day?
Since my partner Ruben was prescribed 10,000 steps a day, we try to walk together every morning in Buttes-Chaumont. It helps me clear my mind before starting the day and maintain some level of fitness. Dancing and singing with my son is our little daily ritual—nothing recharges me faster than those carefree moments of joy shared between us. Cooking, especially together, is essential to me. I love hosting and testing new recipes on my favorite guinea pigs: my partner and my son. As for skincare, I keep it minimal and a bit skeptical of brand claims, but La Cicalfate is my daily must-have. Whenever I apply it, I feel better, my skin stops tightening, and I use it on myself, my son, and Ruben—it feels like this cream heals everything.

Si vous deviez choisir 4 plats/saveurs, il peut y avoir aussi des restaurants, que vous appréciez particulièrement, lesquels seraient-elles et pourquoi ?
La Minestra de ma Nonna. Comprendre : soupe de légumes de ma grand-mère. Elle est d’origine italienne, et c’est un plat d’une simplicité absolue, mais tellement réconfortant. C’est vraiment le goût de l’enfance. Au point que j’en ai fait un documentaire dans le cadre du Grandma’s Project, une web-série collaborative autour des grands-mères et de la cuisine.
Le couscous : j’adore le préparer en mélangeant les recettes de Tunisie avec celles du Maroc — mon compagnon est d’origine marocaine mais aussi tunisienne comme moi. C’est un plat qui raconte nos deux cultures et qui a une vraie dimension familiale pour nous. J’aime ce mélange de couleurs et de saveurs.
Chi’s Vietfood, à Belleville : un petit restaurant du quartier que j’adore, pour ses saveurs vietnamiennes parfumées, fraîches et toujours justes. C’est mon adresse réconfort. Mention spéciale pour le Bánh Mì végétarien, inégalable.
Limp Sept, toujours à Belleville : un restaurant chinois et plus particulièrement de cuisine du Sichuan. Une cuisine simple, généreuse et délicieuse. J’y vais souvent, sans jamais m’en lasser.
If you had to choose 4 dishes or flavors — including restaurants if you’d like — that you particularly enjoy, what would they be and why?
La Minestra de ma Nonna—my grandmother’s vegetable soup—is a dish of absolute simplicity but immense comfort, truly the taste of childhood. It inspired me to create a documentary as part of the Grandma’s Project, a collaborative web series about grandmothers and cooking. I love preparing couscous by blending Tunisian and Moroccan recipes, reflecting both my and my partner’s roots—he is of Moroccan and Tunisian origin like me. This dish tells the story of our cultures and has deep family significance, with its vibrant colors and flavors. In Belleville, I adore Chi’s Vietfood, a small restaurant offering fragrant, fresh, and perfectly balanced Vietnamese flavors—my go-to comfort spot, especially for their unbeatable vegetarian Bánh Mì. I also frequent Limp Sept, a Chinese restaurant specializing in Sichuan cuisine, where the simple, generous, and delicious dishes never fail to satisfy.

Silver Star – 26 novembre 2025 | Réalisé par Ruben Amar et Lola Bessis | Avec Grace Van Dien, Troy Leigh-Anne Johnson et Tamara Fruits.
Photographie principale : © Emma Ledoyen
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Sandra Hirth
