Notre sélection ciné du moment, avec des films allant du drame social percutant au grand documentaire historique, sans oublier le divertissement familial et le récit d’émancipation intime.
Our current movie picks range from hard‑hitting social drama to major historical documentary, with family entertainment and intimate stories of personal emancipation also in the mix.
Silver Star : road-movie puissant, l’hymne à l’Amérique marginalisée
Le second long-métrage de Ruben Amar et Lola Bessis est un road-movie féministe qui transforme une cavale désespérée en un récit d’une humanité poignante. Loin du rêve américain, le film s’impose comme un drame social important.
Silver Star débute par un braquage raté : Billie, tout juste sortie de prison, enlève Franny, une adolescente enceinte. Cette prise d’otage impromptue se mue rapidement en une errance chaotique à travers une Amérique oubliée. Les réalisateurs filment avec une justesse crue les motels miteux et les stations-service isolées, faisant de ce paysage le miroir de la marginalité et de la pauvreté.
Le cœur du film repose sur le duo d’actrices : Troy Leigh-Anne Johnson (Billie, farouche et traumatisée) et Grace Van Dien (Franny, impulsive et vulnérable). Ce duo inattendu, initialement hostile, crée une alchimie rugueuse qui débouche sur une sororité d’urgence. Le film s’abstient de toute héroïsation, préférant explorer leur fragilité et leur dignité retrouvée dans le partage et la compréhension mutuelle.
Silver Star réussit le pari de faire d’un récit de violence sociale un voyage profondément humain où l’espoir se trouve dans la solidarité. Un long-métrage qui résonne longtemps après le générique.
Silver Star, the second feature by Ruben Amar and Lola Bessis, is a feminist road movie that turns a desperate getaway into a deeply human story. It follows Billie, freshly out of prison, whose failed bank robbery leads her to kidnap Franny, a pregnant teenager, and the two women embark on a chaotic journey across forgotten corners of America. As they drift through shabby motels and lonely gas stations, their initially hostile relationship evolves into a raw, fragile bond, revealing an urgent form of sisterhood. Without idealizing its characters, the film portrays their vulnerability and the dignity they reclaim through shared experience, transforming a tale of social violence into a moving, hopeful exploration of solidarity.

Zootopie 2 : un retour à toute berzingue !
Dix ans après le premier opus, la ville bigarrée où prédateurs et proies cohabitent fait un retour étincelant — et surtout incroyablement rythmé !
Dès les premières minutes, nous retrouvons le duo emblématique, l’agente Judy Hopps et l’escroc reconverti Nick Wilde, propulsés dans une enquête aussi dense que nerveuse, menée tambour battant.
Ce film d’animation plaira à tous : aux enfants, qui découvriront une aventure palpitante, colorée et en perpétuel mouvement, et aux adultes, qui savoureront un scénario intelligent, rapide, et farci de références réjouissantes.
Un retour réussi dans une cité où, plus que jamais, la diversité fait la force… à toute allure et avec un solide sens du cinéma.
Ten years after the first film, the vibrant city where predators and prey live side by side returns in a dazzling, fast‑paced sequel. The story quickly reunites officer Judy Hopps and reformed hustler Nick Wilde on a high‑energy investigation that never slows down. This animated adventure works for kids, with its colorful, constantly moving action, and for adults, thanks to a clever, reference‑packed script. It’s a successful comeback to a city where diversity is once again shown as its greatest strength, at full speed and with real cinematic flair.

Je n’avais que le néant : l’hommage qui révèle la genèse de Shoah
À l’occasion du centenaire de la naissance de Claude Lanzmann, Guillaume Ribot propose un pèlerinage douloureux mais essentiel au cœur de la création de Shoah. Loin du remake, ce documentaire intime et exigeant plonge dans les rushes inédits pour saisir l’humilité face à l’horreur et le prix d’un devoir de mémoire.
Le cinéma face à l’indicible : voilà le champ de bataille que Claude Lanzmann avait ouvert avec Shoah (1985), un monument de neuf heures qui écartait toute archive visuelle pour ne laisser place qu’à la parole des témoins et à l’immobilité des lieux. Quarante ans plus tard, le réalisateur Guillaume Ribot ose retourner à la source, non pas pour rivaliser, mais pour comprendre. Son documentaire, « Je n’avais que le néant », tiré de plus de 220 heures de rushes jamais vues et des mémoires intimes de Lanzmann, est l’antithèse d’un simple making-of. C’est une enquête archéologique qui s’interroge sur la genèse d’une œuvre radicale : comment a-t-on transformé le « néant » — ce vide absolu que Lanzmann cherchait à combler — en un récit.
La grande force de Ribot réside dans son exigence morale. Il reprend à son compte la rigueur éthique de Lanzmann : aucune concession au spectaculaire, aucune dramatisation facile. Le film n’est pas là pour divertir, mais pour témoigner du poids. En nous emmenant de New York à la Pologne, Ribot utilise ces images tremblées et silencieuses pour rendre palpable l’absence.
Le documentaire ne cherche pas la réponse, mais le processus. Il révèle les hésitations, les doutes, les inquiétudes logistiques et financières qui ont jalonné les douze années de fabrication de Shoah. Cette transparence est bouleversante. Elle désacralise l’artiste pour mieux révéler l’homme, montrant que l’engagement de Lanzmann fut total, vital, et souvent chaotique face à la tâche titanesque de saisir une vérité historique.
En ressuscitant le travail de l’ombre, le film rappelle qu’un film sur la Shoah n’est pas un film comme les autres ; c’est un acte de lucidité et d’honnêteté. Il réactive, pour une nouvelle génération souvent éloignée des témoignages directs, l’urgence du souvenir et le poids de l’Histoire.
Un film qui bouscule et rappelle l’urgence du témoignage.
Guillaume Ribot’s documentary, released for the 100th anniversary of Claude Lanzmann’s birth, offers a powerful behind-the-scenes look at the making of Shoah. Using over 220 hours of unseen footage, it explores Lanzmann’s moral rigor, doubts, and the immense difficulty of capturing testimony about the Holocaust. Instead of dramatizing, the film reveals the personal and ethical challenges faced over twelve years of production, reminding viewers why bearing witness remains urgent and necessary.

La Petite Dernière : l’émancipation entre foi, amour et liberté
Avec La Petite Dernière, la réalisatrice Hafsia Herzi offre un portrait sincère et pudique de l’émancipation d’une jeune femme tiraillée entre traditions, foi et désir. Adaptée du roman de Fatima Daas, l’histoire suit Fatima — dernière d’une fratrie, élevée dans une famille d’immigrés algériens en banlieue — alors qu’elle entre à l’université, découvre le monde, et explore son attirance pour les femmes.
Herzi n’impose rien, elle accompagne. Par une écriture sobre, une mise en scène délicate et une sensibilité constante, elle parvient à rendre palpable le malaise intérieur, les doutes, les contradictions — entre la foi, l’amour et le désir de liberté. Tout est dans la nuance.
Ce film s’impose comme un jalon important du cinéma contemporain français — non pas parce qu’il bouleverse de façon spectaculaire, mais parce qu’il ose raconter ce qu’on entend rarement : l’intersection de l’identité, de la religion, de l’amour et de la quête de soi, chez une jeune femme lesbienne issue d’un milieu immigré.
Plus qu’un simple « coming-of-age », La Petite Dernière questionne les tabous, les attentes familiales et sociales, les peurs de décevoir, tout en montrant la force du désir et de l’authenticité — sans tomber dans le misérabilisme.
Un film nécessaire, sensible et marquant.
Hafsia Herzi’s La Petite Dernière is a quietly powerful portrait of Fatima, a young woman from an Algerian immigrant family who discovers her desire for women while starting university. Balancing tradition, faith, and sexuality, the film portrays her inner conflict with restraint and nuance. More than a simple coming‑of‑age story, it explores identity, religion, love, and self‑acceptance without sensationalism, making it a sensitive and necessary work in contemporary French cinema.

Photographie principale : Silver Star
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CB
